Un jour j'étais dans la tranchée
Un' ball' me sifflant à l'oreille
Je m' dis ça y est j'suis amoché
Un Boch' veut m'la faire à l'oseille
C'est un pruneau dans l'genou droit
Qui m'a zigouillé la rotule
Mon voisin m'dit l'noyau crois-moi
T'aura cassé la "canicule".
Délicatement on nous plaça
Dans un wagon de 1ère classe
Sur les banquettes on s'prélassa
Tu parles mon vieux c'était "palace"
J'réfléchissais pendant c'temps-là
Aux civils qui maudissent la guerre.
C'est à croire que ces enflés-là
N'ont jamais roulé en première.
On arriva dans un pays
Où qu'y avait un tas d'infirmières
J'eus la veine que les plus jolies
C'est sur moi qu'elles s'précipitèrent.
Puis ell's m'enlevèrent mes godillots
Mon falzar ansi qu'mes chaussettes
Et me laissèrent trois jours dans l'eau
Afin qu'je n'sente plus la crevette.
Quand mon grand bain fut terminé
C'est alors qu'commença la fête
Une p'tite jeunesse vint m'frictionner
Mais avant de r'mettre ma liquette
Ell' m'dit comme ça : ne bougez pas
J'vais vous prendre en photographie
C'est pour choisir les plus beaux gars
Une fois qu'la guerre sera finie.
Tous les matins à mon réveil
Une infirmière venait m'surprendre
Je m'faisais pas tirer l'oreille
Je m'retournais sans faire attendre
Quand pour prendre ma température
Vite ell' me découvrait les hanches
J'disais Mam'zelle j'voudrais pour sûr
Que ça soit à charge de revanche.
À la p'tite femme qui me soignait
Un jour j'dis j'veux r'voir ma famille
J'ai décidé que j'm'en irais
Mais au moment d'franchir la grille
Ell's'mit d'vant moi et m'dit très fière
Vous m'passerez plutôt sur le corps.
J'réponds c'est ça nous sommes d'accord
J'sais rien r'fuser aux infirmières.